De la bière II

Je reviens d’Alsace où j’ai passé le week-end…

Non, rien à voir avec l’ouverture des marchés de Noël que j’ai plutôt soigneusement évités : j’ai été Strasbourgeoise longtemps. J’ai donc vu changer la nature des stands et de la marchandise ou comment on est passé de l’artisanat et des douceurs locales au made in China et au vin chaud acheté tout fait à Metro.
Non, il n’y a pas de métro à Strasbourg, juste un tram. Metro, c’est le magasin de gros. Non, on n’y achète pas de type bedonnant pour en faire des Pères Noël (quoique, ça pourrait venir), juste des cubis de mauvais rouge déjà épicé (en Chine ?).

Et du vin chaud, je passe à la bière (oui je sais, quelle transition, hein). Retour sur ma chronique du 28 septembre car j’ai pu corriger et compléter certaines de mes informations… Santé !

D’abord et hélas, la brasserie Fischer de Schiltigheim a bien été fermée par Heineken il y a un an… Pour l’instant la société hollandaise continue à en faire sur ses chaînes de fabrication, mais en Hollande et avec la ferme intention d’arrêter bientôt cette bière de tradition. D’ici un ou deux ans, selon le responsable passionné du « Village de la bière » à Strasbourg, magasin spécialisé où on trouve quasi toutes les mousses imaginables.

C’est en discutant avec lui que j’ai réalisé qu’il y en va de la bière comme du reste : deux grands groupes se partagent le marché mondial, Heineken, hollandais donc, et Anheuser-Busch InBev, belgo-brésilien, avec notamment sa filiale InBev, belge. InBev a des marques comme Leffe, Hoegarden, Stella ; Heineken a Affligem, Edelweiss, Pelforth et Fischer, Adelscott et Desperados, anciennement élaborées et brassées en Alsace à Schilitgheim…

Même la brasserie La licorne dont je parlais appartient certes à l’alsacien Karslbräu… qui appartient lui à Karlsberg. Non, je ne me trompe pas de lettre : Karlsberg, c’est allemand, Carlsberg, c’est danois, faut suivre !

Tout ça pour dire, sans mauvais jeu de mots, qu’il est difficile de tenir dans le monde de la brasserie sans se faire absorber. Les deux gros (oui, les bedonnants si vous voulez, les géants Heineken et InBev) veillent et rachètent toute moyenne brasserie qui en se développant pourrait leur faire de l’ombre. Et personne ne résiste.

En Allemagne, les brasseries munichoises traditionnelles Spaten, Franciskaner et Löwenbrau appartiennent désormais à InBev. Comme le marché allemand est l’un des meilleurs au monde, InBev, « bienveillant », laisse Franciskaner et les autres brasser et fabriquer leur production traditionnelle… et encaisse derrière. Mais au-delà du marché allemand, la bière de base n’a pas le vent en poupe et souffre plutôt d’une baisse de consommation.
D’où la volonté d’Heineken de tout rafler, d’arrêter les « sous-marques » et de ne faire que de la Heineken, insipide, et facilement exportable… en Asie ! Le voilà le premier marché. Avec nos fins palais et nos envies de bonnes bières, on peut se rabhiller !

Quoique… Justement, l’avenir semble être aux bières spéciales, justement l’avenir semble être aux micro-brasseries.
A l’image de ce couple de Matzenheim, qui a installé des cuves dans sa grange et élabore soigneusement une bière fine et surprenante, la Matten, à base d’ingrédients 100 % naturels.
On y revient ! L’avenir est au bio, l’avenir est à la proximité, seules garanties de boire et manger de bonnes choses et de soutenir directement les producteurs sans engraisser intermédiaires et grands groupes qui n’en ont rien à faire de ce qu’ils vendent tant que ça rapporte.
Et la Red Fox IPA, belle rousse goûteuse et mousseuse de Matten est très convaincante. Elle a d’ailleurs remporté la Médaille d’Argent au Mondial de la bière 2010*.

J’ai aussi goûté la Hollbeer (de Riquewhir), un rien acidulée, aux fines bulles sans être très mousseuse. Hollbeer… All beer ! Tous à la bière de micro-brasseries, il y a de l’espoir !
Et justement certains ex-employés de la brasserie Fischer ont retrouvé du travail à la brasserie « de l’Espérance »… que celle-ci appartienne aussi au gros Hollandais et produise de la Heineken ne surprendra plus personne.

*site de Matten
Le village de la bière à Strasbourg : 22 rue des Frères
A Paris, il y a un magasin de bières dans le marché Saint-Quentin près de la Gare de l’Est (85 bd de Magenta, 10e)

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