BioGM, une drôle de chimère


Photo : leslegendesduhobbit.free.fr

Depuis janvier 2009 est entrée en application la directive européenne de 2007 autorisant les OGM à 0,9 % dans les produits bio, c’est-à-dire comme dans le reste de l’alimentation… Quand y a du gène y a plus de plaisir.

Beaucoup d’entre nous l’ignorent encore, mais les OGM sont déjà dans notre alimentation, puisque ce seuil de 0,9 % autorisé veut dire que jusqu’à cette proportion, pas besoin de spécifier la présence d’OGM sur l’étiquette. Et ce, même si la culture des OGM en plein champ est interdite commercialement en France (ce qui n’empêche pas la présence de cultures « expérimentales »), et même si le moratoire sur le maïs MON810 est maintenu, grâce à la collecte de 100 000 signatures en un mois par Greenpeace (première bonne nouvelle). Car les industriels de l’agro-alimentaires aiment les OGM importés : ils envahissent le secteur sous forme d’alimentation pour les bêtes (soja, colza) que nous mangeons ou dont nous mangeons les oeufs, le lait (et les yaourts, le fromage et tous les produits fabriqués avec), sous forme d’huile et de lécithine (tournesol, colza, soja) présentes dans le chocolat, et mille et uns produits préparés. Non, point de joli conte, pour les fournisseurs, il n’y a que des comptes.

Et des comptes à régler avec eux, on en a, partout en Europe… En Allemagne, la ministre de l’Agriculture a décidé à son tour, hier, de suspendre la culture du maïs Mon 810 « dans l’intérêt de l’environnement » (deuxième bonne nouvelle). En effet, des études récentes ont montré les incidences de ce maïs sur des organismes « non-cibles », comme les coccinelles et les papillons. Là, non plus on ne chantonne point de comptine enfantine, mais plutôt : « Fais panpan sur le gazon, pour décimer les coccinelles, fais panpan sur le gazon pour décimer les papillons ». L’Allemagne est ainsi le 6e pays (après la France, le Luxembourg, l’Autriche, la Hongrie et la Grèce) à prendre une telle décision. En outre, 80 % de l’opinion française est contre les OGM et les AMAP et autres systèmes de paniers bio fleurissent un peu partout et affichent complet. Seulement voilà… Même dans le bio, il peut y avoir des OGM…

Et ça, ça fait mal au bide ! Bien sûr, on nous dit que c’est parce qu’on ne peut garantir à 100 % que les cultures bio ne contiennent pas du tout de traces d’OGM, en raison de la culture d’OGM expérimentaux en plein champ et donc susceptibles d’essaimer (ce qui, en clair, est l’objectif poursuivi par les fournisseurs – voir à ce sujet le très bon film de Marie-Monique Robin, « Le monde selon Monsanto »). Alors on nous dit qu’il s’agit d’une « tolérance », qu’il n’y a pas de raison non plus que les agriculteurs bio se jettent là-dessus pour introduire des OGM dans la nourriture des bêtes, ce qui reste interdit (en culture bio uniquement, donc). Sauf que cette même directive européenne limite le lien au sol dans l’élevage bio de vaches laitières, c’est-à-dire que leur alimentation peut venir à 100 % de l’extérieur de la ferme… N’y a-t-il pas là des paradoxes énormes ? Et une volonté sous-jacente de permettre à des grands groupes de faire du bio, comme ils font du non-bio : sans réel respect de la nature, de l’animal, et accessoirement de l’homme qui consomme ces denrées ?

Mais on n’est pas des con-sommateurs, alors de plus en plus il faudra connaître les producteurs à qui on achète pour avoir des garanties. Ou miser sur des labels comme Demeter* (qui fait de la bio-dynamie, c’est-à-dire une agriculture qui a pour but de soigner la Terre et régénérer les sols, en respectant les rythmes de la Terre et du Cosmos) ou Bio Equitable, qui garantit un respect de la nature et des conditions de travail éthiquement équitables.
Enfin, la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques (FNAB) annonçait le 15 janvier 2009, en « considérant que des pratiques plus durables et plus cohérentes que les minima réglementaires sont en réalité appliquées par l’écrasante majorité des agriculteurs bio français », vouloir créer une marque plus transparente que les labels actuels et approchant le zéro OGM. Cela se fera à travers une association rassemblant notamment la FNAB, les réseaux Biocoop et Biomonde, et l’association de consommateurs Bioconsommacteurs.

Quant à la suite, il va falloir rester vigilants face aux pressions de la Commission Européenne, qui plaide en faveur de l’introduction de la culture d’autres maïs OGM, d’autant plus qu’elle est soutenue par l’AESA** qui a rendu en janvier un avis favorable sur ces maïs. Mais en France, un avis similaire de l’AFSSA* suscitait une remise en cause de la crédibilité de tels organismes, axés sur le court terme et négligeant leur rôle de prévention.
Mais dans cette bataille chimérique des OGM, il s’agit bien du gouvernement des grosses firmes sur la vie agricole mondiale…

Et comme disait Machiavel, « gouverner, c’est faire croire ». Alors ne gobez pas toutes leurs histoires… Ou vous risqueriez de gober autre chose… et pas pour votre plus grand bien. La chimère BioGM ? Non merchi.

*Infos complémentaires :
Demeter
Bio Equitable
FNAB

**AESA : Autorité Européenne de Sécurité Alimentaire

AFSSA : Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments

Maintenons la vigilance : OGM j’en veux pas, l’action de Greenpeace

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