Sensass
Je me sens bien. Quand on ne se sent pas bien, c’est pour se faire sentir par quelqu’un d’autre… Et apparemment, les gens ne se sentent plus.
Leur odeur s’infiltre, s’introduit, s’insinue, s’impose : même sous la porte de chez moi, l’effluve me poursuit, alors que j’essaie de lui échapper tant bien que mal. Mâle frais rasé, femelle aux aisselles rosées du plaisir Narta, déodorants odorants, eaux de toilettes qui s’entêtent, parfums sans fin, qui, somme toute, ne donnent pas faim…
D’où vient donc cette idée que le mââââle fait du bien ? Que la femelle doit se sentir de loin ? Que sentir bon, c’est se sentir fort, toujours plus fort ? En politique, oui, mais aussi… Au boulot, dans la rue, dans l’arène de la vie, faut en mettre plein la vue… Enfin, du « m’as-tu-vu », on passe au « m’as-tu-senti », aujourd’hui.
Si ce n’est pas tout à fait nouveau, on peut quand même noter qu’il y a dérive… Des continents de senteurs se sont délités, jusqu’à devenir odeurs grossières.
Le parfum fit son apparition dès les Sumériens (soit au IVe siècle avant JC), et pas spécialement parce qu’ils suaient leur mère, je ne crois pas.
A l’époque, les produits étaient broyés, pilés, bouillis, imprégnés de matières grasses, et on utilisait surtout des écorces, des résines, des racines ou des matières animales servant de fixateurs. L’objectif était de recréer une effluve florale ou de bois, de nature après la pluie, de coucher de soleil dans la mer, sans les excréments de mouette. On accompagnait l’image qu’on donnait de soi d’un doux fumet qui s’évaporait en fumée.
Sous Louis XIV, c’est vrai, on couvrait ainsi le fait qu’on ne s’était pas lavé et qu’on fouettait la mouette.
Et aujourd’hui ? Le bruit et l’odeur… Le métro. Une agression des sens permanente. Mais il est plus difficile de fermer son nez que ses yeux ou ses oreilles. Et les hectolitres dont s’aspergent les gens débouchent les narines. Et le reste… Car elles en contiennent, ces giclées de liquide parfumé, ambré, transparent ou rosé, destiné à griser.
Des muscs synthétiques aux phtalates, en passant par les éthoxylates d’alkylphénol et beaucoup d’autres substances aux noms barbares, l’industrie du parfum ne néglige aucun composant de synthèse qui présente un double risque potentiel pour la santé et l’environnement. Ces substances chimiques ne restent pas confinées dans les produits et s’en échappent, notamment au moment de leur utilisation. Nous les diffusons dans l’air ambiant et notre corps les absorbe lors de l’application sur la peau, alors qu’elles ne devraient pas franchir la barrière cutanée, à la différence des produits pharmaceutiques…
Nous subissons donc une véritable exposition invisible et quotidienne aux substances toxiques.
En revanche, le naturel a, depuis longtemps été relégué au rang des antiquités.
Mais chassez le naturel, il revient au galop, alors au trot je teste des essences quintessence, des huiles essentielles, essentielle à mon bien-être. Etre ou paraître ? Sentir fort ou sentir bien ?
Pensez que pour votre voisin de métro, Farenheit peut faire monter son degré d’énervement, qu’un Hermès peut lui donner de l’herpès, que Poison peut en être un.
Pour la bonne humeur de tous, réduire les doses, oser le naturel. A bon humeur, salut !